PIERRE BROUSSET, LE BENJAMIN DES ARBITRES DU TOP 14 QUI CARTONNE

Pierre BROUSSET

La cinquième étape du circuit mondial de rugby à 7 s’est disputée le week-end dernier à Las Vegas. Après Dubaï, Le Cap, Wellington et Sydney, les équipes nationales ont donc déboulé dans le Nevada. L’Afrique du Sud s’est imposée, devant les Fidji et les Etats-Unis. La France s’est classée à la douzième place. Dans le désert de Mojave, les hommes du capitaine Terry Bouhraoua ont certes dominé le pays de Galles, mais on perdu face au Canada (0-21) et les Boks (0-31) et n’ont pas vu les quarts de finale.

Au sein de la délégation tricolore, étaient présents deux petits nouveaux : Alexandre Lagarde, l’ailier des Espoirs de Perpignan, et Pierre Brousset, qui partage avec Thomas Charabas la particularité d’être, à 28 ans, le plus jeune arbitre du Top 14. A Las Vegas, puis à Vancouver ce week-end, le jeune homme originaire de Rieumes, un bastion du rugby de la Haute-Garonne, a a été lancé dans le grand bain du 7, succédant ainsi à son compatriote Alexandre Ruiz au panel de World Rugby.

A TOULON, GORGODZE A ESSAYÉ DE M’IMPRESSIONNER MAIS CELA N’A PAS VRAIMENT MARCHÉ. ET, LORS D’UN MATCH AVEC PAU, JULIEN TOMAS N’A PAS ARRÊTÉ DE ME PARLER.

Depuis le début de la saison, on avait remarqué, lors des matchs de championnat, la prestance et le flegme de ce directeur de jeu fraîchement promu dans l’élite de l’arbitrage français, au terme d’une ascension supersonique débutée à l’âge de 17 ans, tout en bas de l’échelle. Chez les jeunes, Pierre Brousset évolue à l’ouverture, ou à l’arrière, du club de Rieumes, dont Jean-Luc, son père, lui-même ancien rugbyman et figure locale, est alors le président. Bon joueur, il accède à l’équipe première. Mais chez les seniors, le niveau augmente, la marche est haute. Il joue encore, mais un peu moins. Parallèlement à cela, il enfile le costume d’arbitre. C’est une révélation. Ou plutôt une confirmation. Car le rugbyman s’essaie en réalité au sifflet depuis les minimes. « Ma motivation première, c’est que je voulais participer au jeu », explique-t-il. Il le fait si bien que, pour ses débuts en Top 14, après deux saisons à découvrir le monde du rugby pro en Pro D2, il a l’honneur d’arbitrer les champions de France en titre, lors de la rencontre Racing-Lyon. « J’ai une chance inouïe de vivre ma passion, dit-il. Je suis un privilégié ».

De fait, Pierre Brousset, grâce à l’arbitrage, a déjà découvert des contrées lointaines qui ne se seraient probablement pas offertes à lui autrement. « J’ai par exemple été invité à passer dix jours en Argentine avec ma compagne, raconte-t-il. Nous avions du temps pour visiter Buenos Aires, nous sommes même allés jusqu’aux chutes d’Iguazu. Je me suis aussi déjà rendu dans tous les pays des îles britanniques, au Portugal… » Tout sourit au jeune papa de la petite Alice, venue au monde en décembre dernier

Pour autant, faut-il le rappeler, on n’a rien sans rien. Et si ce grand espoir de l’arbitrage tricolore cartonne aujourd’hui, c’est d’abord parce qu’il campe un travailleur humble et acharné. « Mes parents étaient les premiers à me suivre, se souvient-il. Lorsque j’officiais en Fédérale 3, mon père me filmait lors de tous les matches, pour que je puisse progresser. Et il ne manquait pas de me donner son point de vue lors des retours en voiture ». De cette époque, il lui reste d’ailleurs le souci du jugement d’autrui sur ses performances : aujourd’hui, il attend systématiquement le débriefing de son « coach » Alain Fernandez (les arbitres en poste sont assistés par d’anciens arbitres, ndlr). Et, pour bénéficier d’un œil supplémentaire, il fait visionner ses vidéos à son aîné Romain Poite, l’arbitre international du comité Midi-Pyrénées qui le suit depuis la Fédérale 3, il y a cinq ans. Perfectionniste. Son but : devenir encore meilleur. « J’ai encore des progrès à faire dans la façon avec laquelle je communique les décisions auprès des joueurs, reconnaît-il. Je dois leur adresser des messages encore plus précis, bien peser les mots que j’emploie ». Lors de ses premiers matches en Top 14, il est testé, doit presque essuyer des tentatives de bizutage : « A Toulon, Gorgodze a essayé de m’impressionner mais cela n’a pas vraiment marché, sourit-il calmement. Et, lors d’un match avec Pau, Julien Tomas n’a pas arrêté de me parler… »

Ces attitudes pleines de roublardise de la part de joueurs aguerris ne le troublent guère. Car Pierre Brousset, au quotidien, est habitué à gérer des situations bien plus sensibles. Educateur sportif, il s’occupe en effet, au sein de l’Association les Jeunes Handicapés (AJH), de faire faire du sport à un public adulte qui demande une attention toute particulière. « J’ai toujours voulu travailler dans le sport, explique-t-il. Je ne me voyais pas le réaliser dans la filière de l’Education nationale. Aujourd’hui, ce que je fais auprès de ces personnes en situation de handicap me plaît beaucoup ». Handicaps mentaux, physiques, troubles du comportement…

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Notre homme doit composer avec autant de cas différents. « Ils sont toujours heureux de me voir et de ce que je leur propose, se réjouit-il. Et ils sont les premiers à me dire qu’ils m’ont vu à la télé. Il y a des relations fortes qui se créent mais je dois veiller à ne pas tomber dans l’affectif non plus. Je ne dois pas leur faire penser que je peux prendre la place de quelqu’un qu’ils n’ont peut-être pas… » Ce métier profondément humain l’aide-t-il quand il se retrouve sur le terrain ? « Peut-être dans la gestion de la frustration des joueurs, oui, détaille-t-il. Parfois, ils peuvent s’agacer lorsqu’ils ont l’impression que toutes les décisions sont prises contre eux. J’essaie de transformer cela en message positif, en utilisant mes capacités cognitives ».

Chaque semaine, Pierre Brousset s’astreint également à un entraînement physique, afin de pouvoir soutenir la cadence des matchs de haut niveau. « J’essaie de me tenir à trois séances hebdomadaires, confie-t-il. Une séance de fractionné, une séance de vitesse et une séance de renforcement musculaire ». Avec des journées si bien remplies, le nouvel arbitre français des World Rugby Sevens Series trouve néanmoins encore le temps de venir parfois porter main forte à l’affaire familiale, l’hôtel-restaurant « Les Palmiers ».

Un établissement immanquable à Rieumes, que la famille Brousset a repris il y a un an et demi environ, après en avoir assuré la gérance pendant quelques mois. Si l’on y mange divinement bien, dans un cadre coquet, sobre et douillet, c’est à coup sûr parce qu’un autre rugbyman opère en cuisine : Lucas Brousset, le frère de Pierre, ex-joueur de Rieumes puis du Fousseret.

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